Sacha Walckhoff, directeur de création de la Maison Christian Lacroix

Il y a rencontre et…rencontre. Celle que l’on oublie ou que l’on préfère oublier dès le seuil de la porte franchie, celle que l’on qualifie d’agréable et enfin celle qui, auréolée d’une lumière particulière, nous transporte et nous fait rêver, nous fait croire en l’homme et en son destin, celle en un mot qui reste inoubliable. Sacha Walckhoff, directeur de la création de la Maison Christian Lacroix, nous a offert cette rencontre exceptionnelle empreinte de générosité, d’émotion, d’humour et de sagesse.CHCH-0040-01_0.jpg sacha

C’est dans son QG, l’hôtel Costes, lieu incontournable de la branchitude, que Sacha Walckhoff nous reçoit. Ce presque quinquagénaire à l’allure de jeune homme et à l’élégante sobriété, nous séduit immédiatement par sa gentillesse et sa disponibilité malgré son agenda de ministre.

Sacha Walckhoff,  vous êtes né en France, vous avez grandi en Suisse et intégré l’école des arts et techniques de la mode de Barcelone ( « Escuela de Artes y Tecnicas de la Moda » ). Pourquoi Barcelone ?

Sans doute est-ce dû à mes premières impressions, celles de la toute petite enfance. J’ai passé ma première année de vie à Barcelone, et je l’ai quittée alors que je n’étais qu’un nourrisson, mais j’ai toujours été très sensible à l’espagnol, envoûté par cette langue sans vraiment savoir pourquoi. Puis adolescent, j’ai passé des vacances sur la Costa Brava et un de mes amis m’a parlé de cette école. L’inscription s’est faite sans moi, je suis donc arrivé là un peu par hasard mais confiant en ma bonne étoile.

 Pourquoi le choix de ce métier?
Lacroix French Froufrou Rose

Je n’ai absolument pas grandi dans le milieu de la mode. En revanche,  je dessinais sans arrêt et ne me suis jamais arrêté. Alors que j’étais à l’ECAL (Ecole cantonale d’art de Lausanne) en Suisse j’ai eu la chance d’avoir  un professeur de dessin totalement irrévérencieux, Pierre Keller, très original et curieux qui recevait des gens comme KEITH HARINGS, DAVID BOWIE entre autres. Sa façon d’aborder le dessin et les personnalités qui gravitaient autour de lui de façon très naturelle  m’ont donné l’impression que tout était possible et m’a donné des ailes pour avancer. D’autre part ma mère cousait elle-même ses robes et était très sensible à la parure. Enfin ma grand-mère était modiste. Tous ces éléments réunis ont très certainement influencé mon orientation professionnelle, et c’est tout naturellement que je me suis tourné vers la mode.

 Parlez-nous de votre parcours professionnel
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Collection Air de Paris pour Designers Guild ©Grégoire Alexandre

J’ai débuté en tant qu’assistant Studio chez Jean Remy Daumas où je suis resté trois ans et où j’ai beaucoup appris de cet homme généreux et philosophe.  En Octobre 1987, je rencontre Elie Jacobson (Dorothée bis ) qui me propose de dessiner les lignes de prêt-à porter masculin « L’homme bis ». Puis en en Février 1992, je  rejoins la Maison Michel Klein. J’arrive en plein bouillonnement d’un défilé. Michel Klein est un créateur qui a des fulgurances dans son travail : au premier essayage il a déjà composé son défilé! Mon expérience dans cette maison a été de courte durée car j’ai été contacté par la Maison Lacroix dès Août 1992

 Parlez-nous de cette rencontre avec Christian Lacroix. Que vous a-t-elle apporté professionnellement ? Humainement?

C’est La rencontre! On parle de Jean Genet, de Perpignan…de tout sauf de couture, il me fait immédiatement confiance et me confie le travail d’un an en un mois sur la maille!  Je relève le défi et mets la Maison en lumière en amenant des matières différentes grâce à mon expérience chez Dorothée Bis.

Alors que vous êtes directeur du studio prêt-à-porter Christian Lacroix,  vous décidez en 2000 de voler de vos propres ailes. Vous vous installez à votre propre compte en tant que consultant pour les maisons Kenzo, Jean Claude Jitrois et Christian Lacroix, pourquoi?

C’était naturel. Un besoin d’évoluer. Je suis très curieux, j’ai confiance dans la vie et

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Lacroix Paris! Grenat Cushion Front SS12

je savais que je prenais une bonne décision. Penser que les choses sont faciles permet d’avancer.

En 2002 Christian Lacroix vous demande de revenir pour être son bras droit. Vous le resterez jusqu’en Janvier 2010, puis vous serez  nommé à la tête de la direction de la création de la maison Christian Lacroix. Comment avez-vous vécu  ces différentes périodes ?

J’ai vécu dix-sept ans de collaboration avec ce garçon très sensible et charmeur  qu’est Christian Lacroix.
Avec lui, Je suis toujours resté un électron libre, tout en étant très conscient de la marque de cette maison, de son esprit. La Maison Lacroix est une maison qui a des valeurs universelles, je souhaite faire évoluer la maison tout en gardant son ADN.

 Quelle est votre création dont vous êtes le plus fier ?
ChristianLacroix Papier pour Libretto

Il n’y a pas de création dont je sois le plus fier; mais d’heureuses surprises comme celle d’avoir gagné le concours visant à redessiner les uniformes de la China Eastern, 7éme compagnie mondiale aérienne. Du succès remporté par la ravissante papeterie Christian Lacroix Papier que l’on peut trouver au Bon Marché, chez Liberty à Londres, au Moma et à la Frick Collection à NY. Il en va de même pour les bougies parfumées réalisées pour Welton London qui déjà toutes été vendues en pré-commande !

 Vous ne vous intéressez pas seulement à la création des collections masculines, mais aussi à l’optique solaire beachwear, accessoires et art de vivre. Avez-vous cependant un domaine de prédilection? De nouveaux projets ?

Je suis fou de déco et nous avons signé avec Tricia Guild, créatrice de la société Designers Guild, une licence pour la décoration intérieure : tissus, papiers peints, tapis et coussins et c’est aussi un grand succès car nous avons doublé nos objectifs. En fait, je serai très heureux de pouvoir développer les arts de la table.

L’entretien arrive à son terme. Nous sommes complètement sous le charme de cet esthète, aimable, généreux, vrai, qui aborde la mode d’une façon quasi psychanalytique: pourquoi la parure? Pourquoi habiller les autres? Pour lui,  la première raison d’être de la parure n’est ni la pudeur, ni la protection mais la séduction.

Sacha Whalckhoff à la modestie des hommes vraiment talentueux, ce talent que Jean Genet saluait en ces termes : « Le talent, c’est la politesse à l’égard de la matière. Il consiste à donner un chant à ce qui était muet. »

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