Chantilly/Villers-Cotterêts

Image de présentation : Ciel lexical (c) Benjamin Gavaudo – CMN2024

Entre deux chefs d’oeuvres ressuscités grâce à deux mécènes, découvrez les Hauts de France pile et face.

Dans l’Oise, le château de Chantilly, dans l’Aisne, celui de Francois 1er à Villers Cotterêt. Le 1er doit sa survie à l’aga Khan, le second à Emmanuel Macron, qui a converti l’unique château Renaissance de Picardie en Cité internationale de la langue française. Le premier est coloré, tapissé de tableaux, de livres, chargé de tapisseries, de meubles d’époque. Le second avec sa muséographie 100% numérique offre un écrin ultra contemporain,  épuré, dépouillé, mais truffé d’écrans.

 Côté pile : Le château de Chantilly, dans l’Oise.

(c)Sophie Lloyd – Château de Chantilly et ses douves

Sauvé du naufrage financier par l’Aga Khan, (qui s’est retiré depuis), il brille d’un éclat aussi minéral que végétal. Il doit au Duc D’Aumale, amateur d’art et bibliophile éclairé, une bibliothèque extraordinaire et le musée de Condé, réputé être le second musée de peinture ancienne après le Louvres. A sa mort ce veuf ayant perdu ses 5 enfants léguera son patrimoine à l’Institut de France, en exigeant qu’on ne touche pas aux murs. Ils sont restés dans leur jus 100% 19ème siècle, pour le plus grand plaisir des touristes qui se pressent toujours plus nombreux pour admirer les toiles de Corot, Raphaël,  ou Fra Angelico et aussi pour les expositions temporaires. 

 Côté jardins, Chantilly c’est l’autre « Versailles », de Le Nôtre qui bénéficia ici d’une totale liberté. 

Tous les 2 ans, ce qui fut le terrain de jeu favori de le Nôtre s’enflamme pour les nuits de feux, connues pour être le plus grand spectacle de pyrotechnie d’Europe. Rendez-vous est pris cette année les17 et 18 juin. On se distrait aussi  à Chantilly grâce aux courses hippiques et au célébrissime  prix de Diane  où le public fait assaut d’élégance à grands renforts de hauts de forme et de capelines. Autre must : les Grandes Ecuries qui accueillent le Musée vivant du cheval et proposent des démonstrations quotidiennes de dressage. Sans oublier la  crème des spectacles équestres à Noël qui reste un enchantement renouvelé sous l’extraordinaire dôme du 18ème. Derrière la carte postale, on trouve le travail de ces hommes et ces femmes qui dédient leur amour au cheval. 

Course à l’Hippodrome Plat © APRH – Chantilly –

Côté face : La Cité internationale de la langue française dans la ville natale d’Alexandre Dumas.

A l’opposé, à Villers Cotterêt, cité marquée par François 1er, le 2eme plus grand chantier patrimonial après notre Dame joue la transparence, voire le dénuement jusqu’à choquer ceux qui ne retrouvent plus l’essence du lieu, ni l’odeur des livres. Inauguré après moults péripéties par Emmanuel Macron le 30 octobre 2023, il ambitionne de faire rayonner la richesse linguistique française. Et de devenir un carrefour international pour tous les acteurs de la francophonie. Il constitue pour les uns une contribution remarquable au patrimoine culturel hexagonal, quand pour d’autres, c’est un beau fiasco. Bref, il fait polémique.

Il n’empêche, la métamorphose de cette ancienne résidence royale qui fut tour à tour dépôt de mendicité, hôpital militaire, puis Ephad, est bluffante. 

Jugez donc : Vous allez arpenter une quinzaine de salles constituant 1200 mètres carrés d’un parcours d’exposition permanente fignolé autour des mots, des lettres, et du papier. Le tout  sur un fond tour à tour blanc brillant, mat, chaud, froid, léger, saturé. Cette narration-abstraction minimaliste vous réserve quelques surprises comme l’entrée dans la cour du Jeu de paume qui s’ouvre sous un ciel lexical  ou cet « extra ordinaire » lustre blanc comme neige composé d’une pluie de pages. Le blanc est plus que jamais, ici un champ chromatique. Il est subtilement texturé pour rappeler le papier, et habille tous les murs intérieurs. Il plonge d’emblée le visiteur dans une expérience immersive qui rend hommage aux paroles, aux livres, et à leur histoire.

Cour du Jeu de paume et son ciel lexical © Benjamin Gavaudo – CMN/2024

On suit intrigué cette muséographie aussi insolite qu’interactive, on déambule entre de nombreuses vitrines cloches qui exposent des objets de collection comme les très concrètes typographiques Garamond, du nom du typographe qui a fixé pour François 1er la langue française en caractères d’imprimerie, et devant les nombreuses projections audiovisuelles, comme ces toboggans qui partent du mur et vous donnent l’impression que des flots de mots fondent sur vous.

Salle La norme et l_usage 1 © Didier Plowy – CMN/2024

On peut aussi tester son orthographe, jouer avec la langue en s’affrontant à d’autres visiteurs sur une grille de mots-mêlées géante. Ou encore découvrir les 72 langues régionales officielles grâce à des luminaires sonores. L’ensemble devrait ravir les plus jeunes quand il risque d’en déstabiliser certains. Mais, n’en déplaise aux détracteurs, ce jeu de transparence et de mat qui compte pas moins de 62 dispositifs numériques audio visuels et interactifs s’accorde avec bonheur à l’architecture intérieure de ce chef-d’oeuvre  de la Renaissance. On commence la visite par l’escalier du Roi, en saluant son symbole la salamandre, et on finit par l’escalier de la Reine. C’est ludique, pédagogique, high tech, et beau.

Pierre-Olivier Deschamps – Agence Vu – CMN/2024

Pratique :

Se renseigner:

www.cite-langue-francaise.fr

www.chateaudechantilly.fr

Bon à savoir

C’est à Villers-Cotterêts que François1er a signé en 1539, la fameuse ordonnance éponyme, consacrant la domination du français sur le latin dans tous les textes administratifs et les décisions de justice.

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