La Jeanne d’Arc des Caraïbes à la Maison de l’Amérique Latine
Photo de présentation : Mélanie Challe
Ça phosphore à la maison de l’Amérique Latine ! Sous la férule bienveillante de Jean-Paul Duviols, professeur émérite de l’Université de Paris IV-Sorbonne, quatre auteurs ont tour à tour présenté leur dernier ouvrage.
Anacaona 1492, l’insurgée des Caraïbes, Editions Anacaona
Paula Anacaona a ouvert le bal avec son livre Anacaona 1492, l’insurgée des Caraïbes, qui relate de façon romancée, la fabuleuse histoire de cette reine oubliée qui régnait sur un des royaumes d’Haïti, jusqu’au funeste jour où les espagnols envahirent le territoire, restructurant la société taïno, et exterminant tout un peuple et sa culture.
L’auteure de ce petit bijou, illustré avec une joyeuse délicatesse par Claudia Amaral, est subjuguée par ce personnage au point d’appeler sa maison d’éditions par son nom. Elle nous transmet avec enthousiasme l’histoire réinventée de cette femme, qui, par sa personnalité combative et indépendante, aurait pu vivre au XXéme siècle. Mais surtout, cette héroïne du XVéme siècle fait écho à notre Jeanne nationale qui elle aussi a pris les armes pour défendre son peuple et connu une fin tragique à l’instar d’Anacaona.
Taïnos « Un Peuple d’Amour »
Hasard des agendas, un autre livre sur les Taïnos vient de paraître : Taïnos « Un Peuple d’Amour », vol.2 : le peuple Arawak de la mer des Caraïbes de 3000 av.J.C. jusqu’à nos jours .
Bernard Michaud et Thierry Cruchet sont les auteurs de ce très beau livre, que l’on feuillette avec un soin tout particulier du fait de sa taille et des superbes photos qui l’accompagnent.
Bernard Michaud s’intéresse depuis de nombreuses années au peuple taïnos et collectionne des pièces rares venues de la nuit des temps; il est spécialiste international de l’art Taïnos. Quant à Thierry Cruchet, c’est un passionné inconditionnel de ce peuple amérindien insulaire.
Les auteurs racontent à travers ses oeuvres artistiques, l’histoire de ce peuple assassiné mais dont cependant on retrouve la trace…encore aujourd’hui.
Le sujet est passionnant et peut soulever la polémique…preuve peut-être que ce peuple est toujours parmi nous.
Voyageurs de la Renaissance. Léon l’Africain, Christophe Colomb, Jean de Léry et les autres, Editions Gallimard
Avec cette anthologie de textes de voyageurs de la Renaissance, c’est une plongée dans un monde fantastique où la soif d’apprendre, de découvrir et de partager anime ces grands découvreurs que sont Pierre Belon et Guillaume Postel pour l’Orient, Vasco de Gama et saint François-Xavier pour la route des Indes, Christophe Colomb et Amerigo Vespucci pour le Nouveau Monde, Jacques Cartier pour le Canada, André Thevet et Jean de Léry pour le Brésil, … Textes fondateurs des grandes découvertes et de l’âge moderne, remis en lumière grâce au travail minutieux de Grégoire Holz, Jean-Claude Laborie et Frank Lestringant.
Frank Lestringant, professeur de littérature française de la Renaissance à l’Université de Paris-Sorbonne, nous présente cette oeuvre avec modestie et humour, mais à sa façon de le dire, on sait déjà qu’on retiendra notre souffle en tournant chaque page de cet ouvrage.
Sur les sentiers de la violence, Editions IHEAL
Dernier auteur à prendre la parole : Valérie Robin Azevedo, anthropologue, spécialiste du Pérou, professeure à la faculté de sciences humaines et sociales – Sorbonne de l’université Paris Descartes, soulève le voile sur les blessures d’un peuple qui s’est longtemps déchiré avec son livre Sur les sentiers de la violence.
Après plusieurs années d’enquêtes menées dans les Andes quechuas d’Ayacucho, l’auteure s’intéresse particulièrement aux séquelles du conflit armé fratricide péruvien de la fin du xxe siècle et notamment sur ses enjeux mémoriels. En effet, cet épisode qui opposa l’Etat aux maoïstes du Sentier lumineux, a creusé de profondes fractures ethniques, socioéconomiques et politiques. ..Le Pérou a alors perdu un nombre incalculable d’hommes et de femmes dans ce conflit armé et le moment du deuil et de la reconstruction, chemin long et douloureux, ne se fait pas de la même façon en fonction du camp dans lequel chacun se trouvait alors…cependant, chacun à sa façon se tourne vers l’avenir, annonciateur d’une certaine résilience…
Semen-Contra suivi de HARR, Poèmes et dessins, Editions Pierre Mainard
Le mot de la fin revient à Jean-Paul Duviols qui ne résiste pas à nous présenter le livre récemment édité par Pierre Mainard de Jorge Camacho. Cet artiste peintre, graveur et dessinateur cubain, est décédé en 2011, mais a laissé de nombreuses oeuvres picturales derrière lui. Un recueil de 20 poèmes inédits datant de 2008 et illustrés par des aquarelles réalisées pour Semen-Contra en 2016, (retrouvées récemment), forme la première partie de ce livret Semen-Contra, suivi de HARR, ensemble de 20 poèmes écrits pour l’exposition « Hommage à Raymond Roussel » galerie Mathias Fels 1967. HARR est aussi illustré par une vingtaine d’aquarelles, le tout formant un délicieux ouvrage où l’on découvre ou redécouvre cet artiste reconnu d’emblée par ses frères surréalistes et dont Breton a pu dire « Nul aujourd’hui mieux que Camacho ne fait mentir l’assertion selon laquelle la peinture surréaliste « semble se soucier rarement de la belle peinture« . » ou encore: « Pour notre plein envoûtement lui est impartie cette gamme illimitée de tons sourds déployant les fastes de ce qui pourrait être au crépuscule ce que l’aurore boréale est à notre matin », (in Brousse au-devant de Camacho, 1964. ).
Et maintenant, BONNE LECTURE 🙂
PRATIQUE
Maison de l’Amérique Latine